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Numérique et gestion des déchets : une transition en devenir ?
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La gestion des déchets ménagers est une activité à laquelle on peut volontiers accoler le quali catif de « brick and mortar », (littéralement briques et mortier) dans l’acception la plus basique du terme, tant sont traditionnels et physiques les moyens et outils qu’elle utilise, et conventionnels les techniques et procédés auxquels elle a recours.
Pourtant, la révolution numérique n’a pas délaissé ce secteur d’activité, qui a été lui aussi bouleversé en profondeur par l’essor des techniques numériques, principalement l’informatique et Internet ! Voyons, à travers quelques exemples, comment le « digital » a chamboulé en quelques décennies le monde du déchet.
Le ramassage des ordures ménagères est souvent effectué au porte-à-porte ; il nécessite l’utilisation d’un équipement coûteux –un camion équipé d’une benne compactrice – et l’emploi d’une main d’œuvre importante, généralement un équipage de trois agents. Autant dire que ce service public, aujourd’hui fourni à l’ensemble de la population, représente une charge lourde pour les nances locales, et il est normal qu’on s’efforce d’en améliorer la productivité. Pour cela, le parcours de la « benne à ordures» doit être déterminé de telle sorte que la plus grande quantité de déchets soit collectée sur la distance et dans les temps les plus courts possibles. On a donc toujours cherché à optimiser les circuits de collecte. Reportons-nous dans les années ’70 : dans les services d’exploitation, des spécialistes, que l’on ne quali ait pas encore de logisticiens, se penchaient sur les cartes d’état- major ou les plans de villes, et armés de crayons et d’un curvimètre, ils traçaient sur des calques l’itinéraire qui leur paraissait le plus ef cace, en puisant dans leur expérience du métier
et leur connaissance du terrain. Les données cartographiques reposaient alors essentiellement sur des supports papier, et les logiciels d’optimisation d’itinéraires n’existaient pas encore... et quand ils rent leur apparition, l’entrée des données était si lourde et complexe que la sagacité humaine a continué un certain temps à l’emporter sur la machine !
La collecte des ordures ménagères au porte-à-porte a cependant un avantage : l’itinéraire de la benne à ordures peut être optimisé une fois pour toutes, chaque tournée étant immuable (en dehors des modi cations d’habitat, de circulation ou d’urbanisme). Il en va différemment avec les points d’apport volontaire qui sont disséminés sur la voie publique pour recueillir le verre, les emballages et les journaux. Le remplissage des conteneurs est alors plus irrégulier, plus aléatoire, et uncircuit gé,quiseraétablidemanière à éviter tout débordement sporadique, amènera souvent le camion de collecte à revenir de sa tournée avec une charge incomplète. On a donc beaucoup amélioré la situation en concevant des
dispositifs qui mesurent le niveau de remplissage de chaque conteneur, et recalculent chaque itinéraire de manière à assurer la charge complète du véhicule. L’apparition des points d’apport volontaire enterrés qui accueillent aussi les déchets résiduels des citadins rend encore plus indispensable ce genre de dispositif.
Aujourd’hui, les SIG (systèmes d’information géographique) se sont développés, les systèmes de navigation embarqués se sont démocratisés, et la plupart des véhicules destinés à la collecte des déchets sont équipés de systèmes de localisation. Ceux-ci permettent notamment de faire appel au véhicule le mieux situé pour desservir dans le meilleur délai un client industriel qui passe une commande urgente de vidage de son conteneur à déchets.
La généralisation de ces systèmes de géolocalisation a parfois suscité l’inquiétude des personnels ou des syndicats qui voyaient poindre un moyen de surveillance, voire de flicage, dans une profession dont la relative autonomie constituait un des atouts essentiels...
Par la commission Déchets et Propreté de l’ASTEE