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LES DIFFICULTÉS DE L’INNOVATION DE SERVICES DANS LES ÉCOSYSTÈMES TERRITORIAUX
Le développement de ces services pose d’importants problèmes. En effet leur conception et leur mise en œuvre impliquent un grand nombre d’acteurs hétérogènes comme on vient de le souligner : collectivités locales, utilisateurs et communautés d’utilisateurs, opérateurs de réseau, détenteurs de données, gestionnaires d’équipements urbains, entreprises diverses, organismes techniques (standardisation)... Pour que l’innovation voit le jour et plus encore arrive jusqu’au marché, ces acteurs qui détiennent des compétences ou des ressources spéci ques nécessaires à l’innovation doivent coopérer. Chacun d’eux y a intérêt mais est souvent en rivalité avec les autres pour s’approprier la valeur ajoutée par l’innovation. Il s’ensuit un problème classique de hold up (crainte que la valeur appropriée par l’acteur soit inférieure à son investissement ou à la valeur qu’en tireront d’autres acteurs). Or, chaque décision d’acteur est conditionnée par celle des autres en raison de leurs complémentarités. Il en résulte un problème chicken and egg : pourquoi investir dans la production d’un élément de l’écosystème si les autres acteurs ne l’ont pas encore fait et vice versa ?
Le partage des données pour construire un service de mobilité multimodale est un bon exemple de ce problème. Pour qu’un service multimodal existe, il faut que les détenteurs, publics ou privés, de données de transport acceptent de les partager. Or ces données sont un actif essentiel de ces entreprises ou opérateurs publics, parfois complémentaires, parfois concurrents. Ils n’acceptent de les partager que si la forme d’organisation du partage leur donne des garanties sur la propriété des données et le retour monétaire qu’ils en attendent. Bref, cela implique une solution coopérative à l’instar de celle mise en place par les banques au travers d’un GIE pour assurer le lancement des cartes bancaires. Le GIE est la plateforme qui a permis de
résoudre le problème de coordination entre les banques, les commerçants et les consommateurs sous-jacent à l’innovation. Dans le domaine des services urbains, le problème est plus complexe car les intervenants sont plus hétérogènes et plus nombreux que dans le domaine bancaire.
C’est pourquoi ces services tardent à se développer alors que la technologie est d’ores et déjà disponible et ouvre à de nouveaux services. Pensons au très lent développement des applications fondées sur le NFC (Near Field Communication), technique de transfert d’informations d’un terminal à un autre, qui ont quasiment fait du surplace depuis une dizaine d’années.
Le problème des smart cities est moins un problème technique qu’un problème d’organisation économique des services et de mise en place de biens collectifs (une base partagée d’informations par exemple) nécessaires à la fourniture de services (de mobilité par exemple). Dans ce cadre, les pouvoirs publics ont un rôle important pour favoriser des solutions coopératives pérennes. Ils le font au travers de nombreuses expérimentations. Mais peu de services survivent aux expérimentations et réussissent à passer à l’échelle.


































































































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